Jean
17, 11-19
Après la lecture de ce texte de l'évangile de Jean, vous
êtes sans doute comme moi : vous vous dites : Qu'est-ce que c'est ce discours ?
Jean a écrit ces paroles pour la réflexion et la méditation dans sa communauté.
Une communauté loin de nous par le temps, mais proche de nous par les
événements qu'elle vit et les problèmes qu'elle rencontre.
Comme nous, ces premiers chrétiens de la fin du premier
siècle sont affrontés à la difficulté de croire sans voir. Les apparitions du
Christ ressuscité sont désormais devenues les souvenirs racontés par les
anciens. Les guérisons et miracles ne sont plus que de beaux récits qui font
rêver à un monde meilleur, mais la misère physique et morale reste dans la
communauté. La foi en Dieu est mise à l’épreuve. Tout comme en notre temps avec
l’indifférence à la religion et au croire. Tout comme en notre temps avec les
difficultés de la vie, les violences, les guerres, les persécutions…
En ce temps-là comme aujourd'hui, comment croire à ce
Jésus mort pitoyablement en croix, ressuscité par Dieu ? Quel sens peut bien
avoir tout cela, toute cette tradition reçue ? Quel sens pour nous dans ce
monde qui est le nôtre ? Eh bien, l'évangéliste Jean essaie d'éclairer et de
fortifier notre foi. Ainsi, dix fois, il emploie le mot "monde" avec
un sens négatif.
Le monde, c'est tout ce qui s'oppose à Dieu, tout ce qui
est contraire au "Royaume de Dieu". En ce sens, Jésus n'est pas du
monde, il se pose en étranger au monde. Comme Jésus, les disciples ne sont pas
de ce monde. Ou plutôt, ils n'ont pas, nous n'avons pas à être de ce monde.
C'est une tâche à accomplir, nous ne devons pas être de ce monde ; un
combat à mener jour après jour. Un combat contre les systèmes qui déshumanisent
le monde ; combattre ce système qui nous rend étrangers dans notre propre
monde. Mais c’est aussi un combat contre nous-mêmes. Car nous sommes,
personnellement et collectivement, complices de ce monde affronté et rejeté par
Jésus. Combat contre nos penchants mauvais.
C’est comme une contradiction quand Jésus dit que nous ne
sommes pas de ce monde. Mais il n'y a pas de contradiction. La vie du disciple chrétien
que nous sommes en ce 21e siècle ne se déroule pas dans une sorte de
monde irréel ou idéal, dans le monde de la religion et d'une piété désincarnée.
Etre chrétien, ce n'est pas être confiné dans les sacristies ou dans les
églises. La vie du disciple chrétien n'est pas de rester entre soi pour bâtir
des associations chrétiennes. C'est être au cœur du monde pour l'humaniser,
pour y établir un peu de fraternité et de paix. C'est être présent dans nos
quartiers, dans nos couloirs, dans nos lieux de vie pour faire dans le concret que
la dignité de tout homme et de toute femme soit respectée. C'est vivre dans la
justice par rapport aux autres et à Dieu. C’est cela le combat à mener.
Et Jésus nous l'assure : nous ne sommes pas seuls dans ce
combat. Comme disait l'ange aux femmes venues au tombeau : "Il vous a précédé
en Galilée", notre chemin est le même que celui du Christ. Il est passé
par où nous passons. Et il nous promet son Esprit. Au cœur de ce monde que Dieu
aime mais qui est travaillé par les forces du refus, et de la révolte, le Père
va donc nous garder et nous sanctifier, en réponse à la prière de Jésus.
Il nous garde, non pas en nous rendant étrangers à notre
monde, non pas en nous isolant comme dans une boulle où nous respirerions
seulement l’air de la foi et de l’espérance, mais en nous fortifiant
intérieurement, par son Esprit, contre l’esprit du mal, contre nos propres
tristesses et nos découragements. Ouvrons nos cœurs à cet Esprit du Seigneur.
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